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Marc Vasseur (Journal à quatre mains)

Mise au point de Pierre Le Coz.

12 Août 2008 , Rédigé par Marc

Suite à l’article du Point et les propos effarants prêtés à Monsieur Le Coz, ce dernier a réagi. Aussi, je publie sa lettre. Dont acte.

 

Cher Monsieur

Je ne puis que comprendre votre légitime indignation à la lecture des propos qui m’ont été prêtés dans le magazine Le point du 3 juillet dernier. Je dois vous dire que j’ai été moi-même très triste de voir à quel point cette revue pourtant notoire avait orienté mes propos dans un sens « prescriptif » alors que j’avais parlé dans un style descriptif.


Dire « voilà vers quoi nous allons aller si nous ne relevons pas loyalement le défi », cela ne revenait pas du tout à dire « il faut sacrifier tous les vieux qui perdent la tête ! » Tous ceux qui me connaissent depuis suffisamment longtemps pourront vous confirmer qu’il n’est pas pensable que j’ai pu tenir de tels propos à la journaliste qui a monté ce dossier. Je puis vous assurer que jamais je n’aurais pu être élu à la vice-présidence du Comité si j’étais un défenseur de ce genre d’idéologie. Les membres du Comité m’ont élu parce qu’ils savent mes positions et connaissent mes publications.


Je m’investis depuis 10 ans dans des formations et anime des manifestations relatives aux aspects éthiques et relationnels de la maladie d’Alzeihmer et participe chaque année à Marseille à la journée nationale de la maladie d’Alzeihmer au Conseil général ; je co-organise à partir de la rentrée prochaine un Certificat universitaire « éthique et maladie d’Alzheimer » au sein de l’espace éthique méditerranéen de La Timone à Marseille.


Le problème avec ce genre de magazine est que l’interviewé ne se voit pas proposé de relire l’entretien (du moins lorsqu’il ne s’agit pas d’une « star »’, ce qui est mon cas, nonobstant les responsabilités que j’exerce au sein du CCNE). C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il n’y a aujourd’hui quasiment plus aucun membre du CCNE qui accepte de répondre aux journalistes, ce qui pourrait nous poser des problèmes de visibilité sociale. Cette déformation grotesque et choquante de mes propos risque encore d’aggraver notre méfiance et conduire le Comité national d’éthique à une sorte de mutisme. Je ne doute pas que vous exerciez votre métier avec professionnalisme ; mais ne pensez-vous pas que le journalisme en France traverse une crise grave ? Beaucoup de questions me sont venues à l’esprit depuis que j’ai lu cette interview : que se passe-t-il au juste aux sein des rédactions des grands magazines français ? Assistons-nous à un retour à un ultra-libéralisme néo-darwinien ? Devons-nous craindre le retour à une « droite pure et dure » ? Est-ce que l’article de cette journaliste n’a pas été déformé par ses supérieurs hiérarchiques qui auraient jugé mes propos trop nuancés, insuffisamment « percutants » ? N’ai-je pas été assez « sensationnaliste » au goût de certains ? Je n’ai pas de réponse à ces questions.


J’ai été stupéfait de lire que j’avais été présenté au tout début de l’entretien comme « un fin connaisseur des systèmes de protection sociale » (sic), ce que je ne suis en aucun cas ! Je n’ai jamais écrit une seule ligne sur ce sujet et je suis formel : je n’y connais strictement rien en systèmes de protection sociale !


Quand j’ai lu cette contre-vérité manifeste dès les premières lignes de présentation de mon CV, j’ai compris que le piège s’était refermé sur moi et que j’allais participer d’une propagande dans laquelle je ne me reconnais absolument pas. Chacun en aura la preuve en lisant mon livre sur L’empire des coachs : une nouvelle forme de contrôle social (chez Albin Michel), qui est une dénonciation sans concession de l’idéologie de la rentabilité (idéologie que l’on me prête dans cet entretien, ce qui est le comble).


Je vous remercie de bien vouloir prendre en compte ces compléments d’information et d’essayer de m’aider à rétablir la vérité. Car au-delà de ma personne, m’accabler serait une manière indirecte de discréditer le Comité d’éthique, dont la légitimité a déjà été gravement mise en cause par une conseillère de L’Élysée en février 2008. Il faut que les citoyens aident et préservent le Comité d’éthique car, quand une société n’a pas ou n’a plus de Comité d’éthique (Chine, Russie...), la démocratie et la liberté d’expression sont en danger. Le Comité est d’une instance de vigilance dont aujourd’hui plus que jamais peut-être nous avons le plus grand besoin. Pour le CCNE, l’éthique est le courage de conserver les problèmes au lieu de les liquider dans des « solutions » (je n’ose dire des « solutions finales »...).


J’ai découvert à mes dépents que Le Point avait décidé de changer de politique éditoriale et de renouveler son lectorat… J’en prends acte et saurai en tirer les leçons qui s’imposent.


En vous remerciant d’avance pour votre aide, je vous prie de croire, cher Monsieur, en l’assurance de ma fidélité aux valeurs que vous défendez et de ma parfaite considération.


Pierre Le Coz (vice–président du CCNE)

 

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M
@AudineLes blogs n'ont fait que relayer et commenter un article paru dans un hebdo politique bien connu. Le blogueur est en droit de penser que des propos évoqués voire cités ont bel et bien été tenus. Cet article m'avait irrépressiblement fait songer à La ballade de Naramaya d'Imamura. Avec toutes les réserves que la distance culturelle exige.Une question: pourquoi cette mise au point si tardive? Le numéro du Point date du 3 juillet, les premières réactions sur le site du Point doivent remonter au 5 juillet (elles sont d'ailleurs très variées et pas toutes indignées).
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A
Très belle lettre, claire et digne.Au contraire de Fer, ça m'interroge sur les blogs. L'indignation s'est propagée comme une trainée de poudre suite à la publication dans le Point. Certes c'est réactif, mais ici, belle démonstration des pièges du Net : comme il n'y a pas de travail de journalisme (au sens noble du terme) (et pas au sens du Point !) format du blog oblige, des condamnations publiques injustes et hâtives peuvent s'abattre sur quelqu'un, sans que ce soit "réparable".Pour ce qui concerne Pierre Le Coz, la moindre des choses était effectivement de publier son démenti, néanmoins, ça laisse un gout amer.
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O
Le démenti vient de mon blog. Voici ma conclusion :nous ne remettons pas un instant en question la<br /> sincérité d’un homme qui nous écrit, dans le courrier électronique<br /> qu’il ne nous en voudra pas de citer : "Cette trahison m’a blessé et en même temps elle a fait naître en moi un fond de révolte". La manipulation opérée par Le Point est particulièrement perverse : en prenant en otage la parole du vice-président du CCNE - emblématique par l’objet même de ce Comité -, l’organe de la droite<br /> décomplexée justifie ses positions idéologiques en les affublant d’une<br /> mensongère inéluctabilité. Non, Messieurs du Point, la<br /> sécurité sociale n’est pas condamnée à abandonner son système<br /> solidaire ! Oui, il est évidemment possible de la financer, pour peu<br /> qu’existe une volonté politique dans ce sens. Et non, Pierre Le Coz<br /> n’entend pas servir d’alibi à vos glaçantes divagations ultralibérales,<br /> lui qui cite un passage du célèbre et magnifique poème de Rudyard<br /> Kipling, Tu seras un homme, mon fils :<br /> "Si tu peux supporter d’entendre tes paroles Travesties par des gueux pour exciter des sots, Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles, Sans mentir toi-même d’un mot"<br /> La conclusion est parfaite.
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J
Les journaleux de merde dans toutes leurs horreurs! ...L'histoire revêt un piquant accru quand on sait que Le Coz, en breton, ça veut dire Le Vieux ...Je ne cesse de dénoncer ces JOURNALEUX DE MERDE ... Y en a marre! Il faut que l'on s'y mette TOUS, gauche et droite confondues, sinon on n'y arrivera pas!
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C
Je n'étais pas intervenue lors de vos billets à fer et toi :je trouvais ça énorme.*Allez lire les articles de Gaëtan Gorce sur son blog (# juin) sur le sujet qu'il a travaillé avec intelligence et sérieux pour le PS, dans une Commission Légistative. Une réflexion qui élève le lecteur.
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